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Programme d'ensemble de rénovation du Lycée. (Par Arnaud & Jean ESTIVAL, architectes)
Architecture Historique – Les idées de la conception Celles de la rénovation Contexte historique Programme d'ensemble de rénovation Mise en valeur du patrimoine architectural Apport de nouvelles fonctionnalités – Mise en sécurité et accessibilité Confort, intégration d'un nouveau mode de chauffage Planches graphiques Plans – Façades – Organisation intérieure et phasage Photos Christophe Camus. |
Contexte historique
La construction des lycées et des écoles peut être considérée comme une œuvre essentielle du XIX° siècle et l'on peut dire qu'un effort sans précédent dans notre histoire a été porté dans ce domaine par les gouvernements de la troisième République. Si les écoles primaires, édifiées dans les communes, relevaient souvent de modèles fonctionnels sans recherches particulières, en revanche, les lycées portaient en eux, à l'échelle d'un département, une symbolique forte dans laquelle on retrouve les valeurs des Lumières : l'éducation laïque, la promotion par le mérite et la connaissance, le développement d'un sentiment d'appartenance à une République porteuse de liberté et d'avenir. L'architecture du lycée Emile Duclaux se devait de présenter une image à la hauteur de ces enjeux.
A Aurillac, l'édification du lycée avait été différée pour des raisons diverses tenant à la difficulté de décider d'un site adapté ou peut-être déjà de… l'éloignement de la Préfecture du Cantal.
Quoiqu'il en soit, une fois la démarche engagée, tout fut fait selon les règles. L'architecte LISCH était un spécialiste des bâtiments publics, les entreprises retenues maîtrisaient les techniques, la sélection des meilleures carrières d'extraction de pierres volcaniques s'avéra pertinente, le planning fut respecté pour cette construction de grande ampleur, si bien que la première rentrée scolaire et l'inauguration ont pu être organisées en 1891.
Le lycée Emile Duclaux vient s'insérer dans la trame des compositions architecturales de qualité qui ont été réalisées sur les premiers contreforts de la plaine de la Jordanne au XIX° et au début du XX° siècle, de la place du Square Vermenouze jusqu'à la gare : Palais de Justice, lycée Jules Ferry, Centre hospitalier.
L'architecture du lycée ne laisse pas indifférent : symétrie parfaite, utilisation de matériaux nobles, austérité tempérée par le parc qui l'entoure.
Pour l'élève qui pénètre en ces lieux, la sensation est forte, elle ne s'oublie pas : vestibule d'entrée, escalier d'honneur, cours intérieures sont autant d'images qui vont marquer le vécu quotidien.
En examinant certains détails du plan d'origine, on relève des dispositions qui inscrivent bien le lycée dans son époque :
- Le magnifique parloir, pièce de qualité, avait pour espace symétrique la salle d'histoire, matière ô combien essentielle à l'heure du premier anniversaire de la Révolution, de la perte de l'Alsace Lorraine et de la constitution d'un empire par les conquêtes coloniales.
- Autre composante importante, la salle d'armes. Les lycéens avaient la possibilité de se familiariser jeunes au maniement des armes et l'on savait qu'il était encore parfois nécessaire de laver son honneur dans des duels, au sabre ou au pistolet, entre témoins.
- Que dire des immenses dortoirs implantés au Nord : leur ambiance spartiate était bien confirmée par le cahier des charges qui imposait une température supérieure à… 5°C.
- L'équipement sanitaire offrait le plus grand contraste entre des égouts haussmanniens de très grande qualité et de bien modestes commodités posées dans chaque cour comme des abris qu'on aurait oubliés et que l'on ne pouvait plus cacher.
En fait, le plan d'origine a peu évolué mais la réussite rapide du lycée a rendu nécessaire la réalisation d'extensions.
Au Sud, une annexe dite "petit lycée", réalisée dès le début du XX°siècle, regroupant salles de classes et divers locaux pédagogiques. Au Nord, un bâtiment scientifique dont les salles viennent enserrer de façon un peu surprenante le volume du gymnase.
Réalisé pour défier le temps et le rude climat de montagne du Cantal, le lycée Emile Duclaux a bien vieilli, les maçonneries de pierre ont reçu la patine des années, mais ne présentent aucun signe d'altération. Les colonnes de fonte qui supportent les toitures des galeries et préaux intérieurs semblent sorties des forges depuis peu et les toitures d'ardoises présentent à distance un aspect rassurant. Cet excellent aspect général est à porter à l'honneur des maîtres d'ouvrage et des constructeurs de l'époque. Il a permis de différer une réhabilitation d'ensemble, qui s'avère aujourd'hui indispensable. En effet, lorsqu'on franchit les portes de l'établissement, on ne peut ignorer la vétusté des menuiseries extérieures et du second œuvre dans son ensemble, on est également interpellé par la prolifération et l'anarchie des réseaux techniques de toutes sortes, ainsi que par le manque de confort ou de fonctionnalités.
Programme d'ensemble de rénovation
Après diagnostic technique, le Conseil Régional d'Auvergne, maître d'ouvrage, a dressé une programmation d'ensemble et retenu après consultation, le conducteur d'opération SODEREC, le groupement de maîtrise d'œuvre ESTIVAL ARCHITECTURE – IGETEC et le contrôleur BUREAU VERITAS.
La réflexion sur l'organisation future du lycée porte sur la totalité du patrimoine bâti. Sans entrer dans des détails trop techniques, nous précisons en quelques lignes les thèmes privilégiés inscrits dans une cohérence d'ensemble :
- Respect et mise en valeur d'un patrimoine bâti de grande qualité,
- Apport de nouvelles fonctionnalités, mise en sécurité et accessibilité,
- Confort, intégration de nouveaux modes de chauffage dans des volumes aux performances énergétiques améliorées,
- Réalisation des travaux en site occupé par phases successives fonctionnelles.
Mise en valeur du patrimoine architectural
La démarche de la maîtrise d'œuvre est empreinte de modestie. Elle est néanmoins animée d'une ferme volonté de respecter et parfois de retrouver les qualités de la composition architecturale d'origine.
Maçonneries, charpentes apparentes, menuiseries isolantes extérieures en bois, couvertures en ardoises naturelles, couleurs et peintures, dallages en pierre, ferronneries, sont autant de techniques à développer suivant les règles de l'art.
Les travaux de réhabilitation du "petit lycée", à ce jour (janvier 2012) terminés, ont permis de retrouver la volumétrie d'origine après dépose des divers appentis, garages ou préaux disgracieux.
Le bâtiment scientifique apparaît aujourd'hui un peu pauvre dans ses façades des années 60. Vêture contemporaine et isolation extérieure viendront donner une nouvelle image de cet ensemble, en dernière phase de travaux. Les planches graphiques et photographiques jointes à cette présentation illustrent ces propos de meilleure façon qu'une longue description écrite.
Apport de nouvelles fonctionnalités – Mise en sécurité et accessibilité
Les planches graphiques présentent également les nouvelles dispositions intérieures du lycée. On peut en extraire deux éléments importants :
- la restauration scolaire est repensée sur le principe de développement d'une marche en avant fonctionnelle, de meilleures conditions de travail pour le personnel de cuisines et de concepts d'accueil des lycéens associant convivialité, bonne acoustique et confort.
- le plateau administratif est regroupé en deuxième niveau sur rue, dans les anciens logements de fonction. Tous les éléments architecturaux de qualité qui agrémentaient ces locaux ont été conservés et mis en valeur : parquets en chêne, menuiseries à panneaux, plafonds moulurés, cheminées en marbre. Bien entendu, ils disposent également de tous les équipements modernes indispensables : éclairage, câblage informatique et réseaux de courants faibles, signalétique, etc.
- la mise en sécurité a toujours été une préoccupation majeure, constamment actualisée au cours de la longue vie du lycée. Dans le cadre des travaux engagés, celle-ci est pensée sur la base des dernières réglementations, mais aussi de façon adaptée phase par phase.
- l'accessibilité aux personnes à mobilité réduite n'avait jamais été une caractéristique essentielle de la plupart des bâtiments recevant du public. Le lycée Emile Duclaux n'échappe pas à ce constat. Il est vrai que sur une topographie contraignante, il était difficile de s'adapter au relief autrement que par de larges volées d'escalier. A l'avenir, deux nouveaux ascenseurs viendront faciliter l'accès aux étages où les différents locaux recevront un traitement spécifique réglementaire.
Confort, intégration d'un nouveau mode de chauffage
La composition générale du lycée est faite de bâtiments étroits qui se referment sur des cours intérieures. Ces dernières desservent directement bien des locaux en contact avec l'extérieur. Une telle conception est à l'opposé des préconisations actuelles de nature à économiser l'énergie. Conscient du problème, le Conseil Régional a initié une démarche qui privilégie les techniques de nature à améliorer le confort tout en réduisant au maximum les dépenses énergétiques : la chaufferie centrale au bois du centre hospitalier voisin assurera dorénavant le chauffage du bâtiment central comme des classes scientifiques. Les isolations thermiques sont partout mises en œuvre en privilégiant l'utilisation de matériaux naturels comme le chanvre. Menuiseries et vitrages extérieurs ont été retenus en fonction de leurs qualités isolantes.
Réalisation des travaux en site occupé par phases successives
Pour limiter l'impact et les contraintes de chantier sur la vie de l'établissement, seule une solution de réalisation des travaux par phases successives était envisageable. D'autre part, il était nécessaire de trouver préalablement des solutions de repli permettant de libérer les zones de chantier de toute cohabitation avec les élèves. C'est dans cette démarche générale que les premiers travaux de restructuration du "petit lycée" ont permis d'aménager salles de classe et logements de fonction.
Cette première tranche de travaux comprend également la mise en œuvre du plateau administratif, de la vie scolaire et du hall d'accueil
général.
Sans entrer dans le détail d'un phasage complexe et délicat, on peut résumer l'organisation générale des travaux de façon synthétique : cinq phases en cinq ans dans le cadre d'un budget de travaux de 10 millions HT d'euros environ.
- 1ère phase : bâtiment annexe suivant description déjà énoncée
- 2ème phase : cour Mondor (à l'Ouest) comprenant en particulier la restructuration des cuisines
- 3ème phase : cour centrale
- 4ème phase : cour Garric (à l'Est)
- 5ème phase : bâtiment scientifique au Nord.
Commencé en 2010, cet important chantier mis en œuvre par des entreprises locales se terminera en 2015. Cette durée de travaux paraîtra longue aux professeurs comme aux élèves dont certains n'auront connu l'établissement qu'à travers le prisme des sujétions diverses
de déménagements, bruits et autres parcours allongés … Ces travaux vont-ils constituer pour les élèves une allergie définitive aux métiers du bâtiment ou au contraire certaines vocations pourraient-elles naître de cette confrontation quotidienne avec l'élaboration progressive de notre
cadre de vie ?
Février 2012, Arnaud & Jean ESTIVAL, architectes.